Ce projet sur lequel j’ai travaillé pendant plus de trois ans est le fruit d’une rencontre humaine et de rencontres animales. J’ai rencontré François, le berger, il y a huit ans alors que je me rendais à un affût dans la combe des Begnines (Jura VD) où pâturent ses génisses. Les années passant et nos rencontres se multipliant, de solides et sincères liens se sont tissés entre nous. Je me suis épris d’une passion grandissante pour ce lieu très spécial et même pour ses vaches, qui avant cela, représentaient plus des trouble-fêtes lors de mes affûts qu’autre chose. J’ai passé énormément de temps là-bas dans cet alpage et ces forêts qui l’enclavent, et comme tous ces bergers avant moi, j’y ai probablement aussi laissé une partie de mon âme.

Si ce projet me tient tant à cœur, c’est parce qu’il représente ma vision de la nature, de l’homme et de notre place dans le vivant. La nature est un héritage que l’on reçoit et que l’on transmettra à notre tour, on ne peut choisir quelle partie nous voulons ou ne voulons pas. Les pâtures viennent avec les chardons, alors que la forêt abrite les bêtes. Entre l’écho des cloches passe le lynx et brame le cerf, parfois même entre les aiguilles du sapin guette le loup. C’est comme cela depuis la nuit des temps et c’est le devoir de notre génération et de ceux qui s’en soucient, de faire en sorte que cela ne soit pas anéanti. La nature est la seule place qui est faite pour l’homme, il ne doit pas s’en dissocier, encore moins l’asservir. Cet héritage de notre nature, de notre paysage ne doit jamais n’être plus qu’un souvenir entre les pages d’un livre. Par une démarche essentiellement artistique, c’est le message sincère que j’aimerais transmettre. Un travail qui m’a beaucoup été inspiré par l’œuvre de Marcel Imsand « Luigi le Berger, 1990 » éminent photographe et artiste suisse.